musée national singapour

21 juin 2019

Musée national de Singapour: le packaging ou l’histoire d’un pays

Ceux dernières semaines, je t’ai emmené aux Philippines. Je continue à te faire voyager, mais cette fois-ci, à 10 minutes à vélo de chez moi : au Musée national de Singapour.

Les Singapouriens sont connus pour leur amour de la nourriture. D’ailleurs, les chauffeurs de taxi te posent souvent deux questions: combien tu paies ton loyer ou aimes-tu la nourriture à Singapour. Ils sont très fiers de leur culture gastronomique.

Musée national Singapour

À tel point que la Cité-État a fait la demande au mois de mars dernier pour que la culture des hawker centers (emblême de la Street Food ici) entre au patrimoine de l’UNESCO.

Ce n’est donc pas surprenant que le Musée national de Singapour consacre en ce moment même et ce, jusqu’au 15 septembre, une exposition sur l’histoire des emballages alimentaires au 20e siècle. Son titre original est Packaging matters – Singapore’s food packaging story from the early 20th century.

musée national singapour emballage

Du packaging, nous y revoilà! Oui, comme à Londres avec le Museum of Brands sur lequel j’avais rédigé un article. Maintenant que tu connais mon amour pour cet aspect du marketing, tu sais que je n’ai pas pu m’empêcher d’aller y faire un tour. Je te résume ma visite, photos à l’appui.

Les débuts du packaging

Je te le rappelle en passant, la République indépendante de Singapour est toute jeune. Elle n’a que 54 ans. Avant la Singapour qu’on connaît aujourd’hui, l’Empire britannique a dominé le pays pendant un siècle et demi. C’est dans ce contexte que l’exposition commence.

Durant cette période, l’agriculture et les plantations sont importantes. Et cette industrie ne bénéficie pas toujours des meilleurs auspices. Entre le climat, les insects nuisibles, les mauvaises récoltes, les lacunes en terme d’écologie locale: cultiver n’est pas de tout repos.

musée national singapour colonialisme

C’est à ce moment-là que se sont développées des techniques de conservation telles que la boîte de conserve. Une nouvelle industrie était née. Évidemment, le “marketing” a églement pointé le bout de son nez. D’ailleurs, les boîtes de conserve d’ananas de Singapour étaient très convoitées internationalement et en Grande-Bretagne.

L’esthétique des emballages

Les premiers emballages et étiquettes sont dessinés. Ils reflètent l’époque colonialiste jusque dans leurs sujets. En revanche, dès le début du 20e siècle, l’identité locale s’affirme. Des familles locales tiennent les manufactures. Les boîtes en métal, bouteilles, boîtes en papiers et autres emballages sont produits à Singapour.

Ces emballages représentent une industrie alimentaire qui devient de plus en plus forte. Elle collabore avec des multinationales tout en maintenant la production de nombreux produits locaux. C’est dans les années 1960-70 que son apogée aura lieu.

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Parallèlement, les emballages deviennent plus “locaux” et se teintent, au fur et à mesure, de réalisme. Les contenants deviennent de véritables vecteurs de publicité. C’est à ce moment-là que se développent logos, fonts, photos, couleurs, design et identités graphiques de marques très populaires. Certaines sont encore présentes aujourd’hui.

Le texte, est également de plus en plus présent au travers des slogans ou des informations nutritionnelles. Le packaging traduit des distinctions sociales telles que la classe, le genre ou l’ethnie. L’emballage devient un moyen de communication, mais aussi un reflet de la culture populaire de Singapour.

Par la même occasion, la récupération des boîtes de métal devient courante. Elles deviennent des écrins pour accueillir d’autres objets. Leur usage est aussi carrément détourné: une boîte en métal trouée peut devenir un cuiseur vapeur.

Une certaine résistance à Coca Cola

singapour tiger

L’exposition, qui comporte des vidéos et des témoignages sonores, présente un fait très intéressant. Vernon Cornelius, une figure locale de la scène musicale occidentale, explique que, malgré un marketing déjà rodé en Occident, la préférence des habitants de l’époque va aux produits locaux, notamment, pour les boissons.

singapour sinalco

Coca Cola et Pepsi ne sont pas numéro un. Les raisons? En premier lieu, l’emballage! Les bouteilles sont plus petites alors que le prix est plus élevé. Les compagnies locales, offrent des bouteilles plus grandes pour un moindre prix. Par ailleurs, les Singapouriens considèrent le Coca Cola trop gazeux et l’apprécient moins.

En revanche, je n’ai pas rêvé, j’ai bien vu une affiche de Sinalco. Cette boisson, créée par un allemand, deviendra suisse en 1981 (le Sinalco, pas son créateur)… D’un coup, je suis retombée en enfance.
C’était juste pour le clin d’oeil à mon pays🐮.

emballages naturels

Des emballages naturels

Une très (trop!) courte section rend hommage aux emballages naturels, ceux faits de feuilles. Ce sont certainement les plus traditionnels et les plus écologiques de toute l’exposition.

Cette pratique est commune a de nombreux pays d’Asie et existe toujours. Il n’est pas rare de trouver de petits triangles de feuilles de bambou emballant un délicieux plat local dans les stations d’essence ou d’autres petits magasins.

Non seulement il s’agit d’un emballage, mais en plus, il donne un petit goût différents aux plats qu’il contient selon si la cuisson s’est faite à la vapeur ou au gril ou encore, selon la variété des feuilles choisies: bambou, noix de coco, banane ou encore bétel.

Puisqu’on en est aux emballages naturels, la dernière partie de l’exposition aborde le grand défi du recyclage. De bons conseils et des chiffres sont exposés, afin d’inciter le public à prendre conscience de l’importance du recyclage ou de la limitation de l’utilisation d’emballages plastique. Voilà qui redonne espoir malgré le refus de Singapour l’année dernière de bannir les sacs plastique.

Découvrir un pays et une culture à travers le packaging

Si les plats de nouilles reflètent une multi-ethnicité en fonction de leur préparation ou de leur composition comme l’explique l’exposition, les emballages y contribuent également.

Comme le dit Vincent Gabriel, un enseignant, auteur et consultant pour l’industrie alimentaire dans les années 60: ” En terme de nourriture, nous sommes tous égaux”.
Singapour en est un bel exemple au vue du nombre de cultures qui cohabitent sur l’île.

Cette exposition est une manière originale de découvrir l’histoire de Singapour. Alors si tu t’arrêtes dans la Cité-État pendant tes vacances, passe au Musée national.

L’exposition est gratuite, peut se parcourir en famille, puisqu’elle n’est pas très longue. Un petit livret de jeux, destiné aux enfants, devrait leur permettre de ne pas s’ennuyer.

Bonne visite!

musée national singapour packaging

par Delphine Berclaz